Histoire de maillots
CELTIC FC La story du maillot du Celtic FC : un sacré numéro !
Pourquoi ce club a longtemps refusé d'avoir un numéro dans le dos.
Pendant longtemps, le Celtic FC a refusé d'avoir un numéro dans le dos, pour des raisons purement esthétiques.
Le 25 mai 1967, quand les équipes de l’Inter et du Celtic FC pénètrent sur la pelouse de l’Estàdio Nacional de Lisbonne afin de disputer la finale de la Coupe d’Europe des clubs champions (ex-Ligue des Champions), elles affichent fièrement leurs rayures colorées.
Verticales noires et bleues, nerazzurre, pour l’Inter et horizontales blanches et vertes pour le Celtic FC. Alors que les Italiens arborent un numéro dans le dos, les maillots écossais, eux, en sont totalement dépourvus : ni derrière et ni devant. En fait, les numéros allant de 1 à 11 sont floqués en gros chiffres arrondis verts deux fois sur leurs shorts blancs ! Une fois devant, une fois derrière.
Mais comment est-ce possible, alors que depuis 1945, les numéros fixés au dos des joueurs se sont généralisés un peu partout puis sont devenus réglementaires en Ecosse à partir de 1960 ? Parce que le Celtic n’est pas un club comme les autres.
En fait, le président du grand club glaswégien, Robert Kelly, dit « Bob », rechignait à voir des numéros défigurer la tunique sacrée et attenter à l’harmonie horizontale parfaite des rayures vertes et blanches, les fameux hoops (« les cerceaux », en français). Faire apparaître les trois bandes Adidas (sponsor des All Blacks) sur leur légendaire tunique noire relèverait du sacrilège absolu, n’est-ce pas ?
D’où le compromis du double numérotage recto-verso des shorts, acté le 14 mai 1960 lors d’un match amical Celtic Glasgow–Sparta Rotterdam (5-1), afin de respecter l’obligation réglementaire de la fédé écossaise. La même année 1960, lors d’un tournoi amical franco-anglo-écossais non officiel, les Bhoys avaient joué contre Sedan avec un numéro jaune au dos. Une expérience horrible jamais renouvelée…
La victoire surprise mais flamboyante du Celtic, premier club britannique à remporter la C1 à Lisbonne face à l’Inter (2-1), compléta un premier triplé historique en Europe, avec Coupe et championnat d’Ecosse, en plus de la Coupe de la Ligue. Ce quadruplé, donc, assura le prestige international nécessaire à voir toléré par la suite la curieuse double numérotation des shorts.
L’autoritaire Robert Kelly s’était fait le gardien du Temple très idéaliste des traditions d’un club attaché à sa forte identité irlandaise. Fondé en 1887 par un prêtre irlandais, Frère Walfrid, le Celtic Glasgow avait au départ pour vocation extra-sportive d’être une institution caritative d’entraide en direction de la nombreuse communauté pauvre d’Irlande émigrée à l’est de la ville.
Et c’est à l’été 1903 que fut définitivement adopté l’emblématique maillot à bandes horizontales, vertes, couleur symbolique de l’Irlande, et blanches. À partir des années 50, c’est le trèfle de la verte Erin qui orna le blason du club. Sensibilité irlandaise oblige, le Celtic est d’obédience clairement catholique et républicaine car attachée à l’Eire dont les drapeaux orange-blanc-vert fleurissent toujours à Celtic Park. Tout à l’opposé du club rival de Glasgow, les Rangers, protestants déclarés avec de fortes accointances unionistes envers l’Ulster.
C’est de cette puissante identité socio-politico-culturelle et sportive qu’est née une véritable mystique du maillot du Celtic. Car les Irlandais ne plaisantent pas avec leurs traditions, exportant partout leur riche héritage culturel au point d’avoir institué aux Etats-Unis la Saint-Patrick comme fête quasi nationale.
Avec une impressionnante fanzone mondiale estimée à 9 millions de supporters, le Celtic Glasgow, club pourtant écossais, est identifié par un maillot devenu signe de ralliement de la diaspora irlandaise, souvent affiché aux murs des Irish pubs.
Voilà pourquoi, parmi les surnoms des joueurs (the Bhoys, the Celts), celui de the Hoops est toujours aussi usité, notamment dans le chant de supporters « C’mon the Hoops !» L’immense Jock Stein, coach protestant de l’âge d’Or du Celtic (1965-1978) et vainqueur du quadruplé 1967, avait sanctifié la tunique du club : « le maillot du Celtic ne se rétrécit pas pour s’ajuster aux joueurs de faible caractère ».
Et quand Desmond White accéda à la présidence du club en 1971, il fit sienne la doctrine de son prédécesseur Bob Kelly : « notre maillot ne se prête pas à la numérotation ». Point barre !
Mais l’exception culturelle s’est peu à peu estompée sous les coups de boutoirs des institutions supérieures. Le 5 novembre 1975, en match retour de deuxième tour de C2 contre Boavista (3-1), le Celtic joue pour la première fois de son histoire en compétition officielle avec un grand numéro noir au dos après injonction de l’UEFA.
La fédé écossaise, elle, mettra fin à la résistance des dirigeants du Celtic en imposant pour de bon le numérotage de leurs maillots à partir de la saison 1994-95. Ceux-ci tenteront bien en début de saison d’esquiver le règlement en floquant les numéros juste sur le haut des manches, comme au hockey, afin de préserver la pureté du maillot côté verso.
En vain : les numéros durent s’afficher au dos, sur un fond carré blanc, rompant définitivement l’harmonie horizontale parfaite des rayures vertes et blanches…
Par tradition, les shorts sont restés numérotés jusqu’à présent mais juste sur le devant. Business oblige, le club avait déjà « sacrifié » le devant de sa tunique en y apposant d’abord en 1977 le premier logo visible de son équipementier, Umbro, puis en 1984 en y affichant son premier sponsor maillot CR SMITH.
Reste le charme mystique d’un maillot demeuré immuable depuis 1903 et une attraction irrationnelle décrite par une étude du très officiel site du club celticfc.com qui affirme que l’écrasante majorité des fans de la communauté Celtic l’ont rejointe parce qu’ils ont d’abord été séduits par the stripes, les fameuses bandes blanches et vertes.