Ce mardi, pour son quart de finale retour contre Aston Villa, le PSG portera pour la cinquième fois de la saison son maillot « fourth », réservé à la Coupe d’Europe. Pour Paris comme pour de nombreux clubs, c’est désormais une habitude de sortir chaque année quatre tenues différentes. Mais pour quoi faire ?

Jérémie Baron

Le renversant succès au Parc face à Manchester City (4-2), le 22 janvier lors de la septième journée de Ligue des champions, n’a pas seulement permis au PSG de lancer une dynamique qui l’a finalement propulsé jusqu’aux quarts de finale.

Il a aussi été une formidable aubaine pour la marque Paris Saint-Germain et Jordan Brand, filiale de Nike, qui inauguraient à cette occasion le maillot « fourth » du club de la capitale, imaginé pour habiller les hommes de Luis Enrique en C1. Une liquette bleu roi aux motifs « ailés » sur les manches, qui a depuis continué de porter bonheur aux Parisiens à chaque fois qu’ils l’ont porté : à Stuttgart (1-4), contre le Stade brestois (7-0) et à Liverpool (0-1, 1-4 TAB).

MARQUINHOS of Paris Saint Germain during the UEFA Champions League match between Liverpool and Paris at Anfield on March 11, 2025 in Liverpool, England. (Photo by Daniel Derajinski/Icon Sport)   - Photo by Icon Sport

Plus on a de maillots, plus on rit

Depuis 2018-2019, le PSG compte à chaque exercice quatre jeux de maillots, dévoilés au fil de la saison. Et c’est loin d’être le seul club en Europe, et même en France, à le faire.

C’est par exemple le cas du RC Lens qui, tous les 4 décembre, révèle une tunique célébrant la Sainte-Barbe – patronne des mineurs. Même si Henri Neveu, directeur communication et marketing des Sang et or, refuse ici la dénomination « fourth » : « Le maillot fourth, c’est un outil pour les clubs qui permet de sortir un peu des codes et créer des choses parfois un peu plus “excentriques”, se faire plaisir sur des designs qui sortent un peu de l’ordinaire, des valeurs du club, de son territoire de marque, etc. Nous, il y a une vraie histoire derrière, il a une certaine symbolique. C’est vraiment le maillot Sainte-Barbe, pas le quatrième maillot. La dénomination fourth, elle a une connotation marketing et parfois dénuée de sens. »

C’est un moment très attendu par les supporters. Ce sont de gros succès populaires, ces maillots

Henri Neveu, dircom du RC Lens

« C’est un moment très attendu par les supporters, poursuit-il. C’est rare d’avoir un nouveau maillot en milieu de saison. C’est un vrai atout pour affirmer le positionnement du club, affirmer qui on est. Ce sont de gros succès populaires. Tout se vend », conclut-il sans donner néanmoins de chiffres.

À quoi servent les maillots fourth ?

En 2023-2024, le Racing avait révélé non pas quatre, mais cinq (!) tenues, en comptant celle imaginée pour le retour de Lens sur la scène européenne. Comment en est-on arrivé là ?

Selon Neveu, avoir trois maillots est déjà un minimum, aujourd’hui, même pour ceux qui ne disputent pas de compétition continentale. « Quand tu joues en Ligue 1, deux maillots, ça ne suffit pas. On a le maillot Sang et or, un autre foncé, mais tu as trois ou quatre matchs dans la saison où tu seras obligé de jouer en blanc, contre certaines équipes, car il y aura un clash entre les couleurs. Ça dépend aussi de la nature des équipementiers, des contrats commerciaux. Nous, avec deux maillots, on ne pourrait pas faire la saison. »

Laisser parler son imagination

Effectivement, le FC Nantes est la seule écurie de Ligue 1 à n’avoir que deux liquettes dans sa garde-robe : le classique domicile jaune et vert, l’extérieur noir aux notes dorées.

À côté de ça, sept formations possèdent un trois pièces, et elles sont autant à être allées jusqu’au quatrième. Hors catégorie, Monaco et Montpellier – comme le Milan ou le Bayern, à l’étranger – en sont même à cinq vêtements différents arborés depuis août. La Paillade avait d’ailleurs lancé un concours, en décembre, pour permettre à l’un de ses supporters de dessiner le quatrième maillot de l’équipe pour les 50 ans du club.

Un concours remporté par un certain Clément, originaire de Montpellier et qui se trouve être lui-même designer de maillots « concepts » assez baroques – sa dernière collection reprend des oeuvres de Leonard De Vinci, Claude Monet ou Vincent Van Gogh – qu’il commercialise sur son site, « L’Humaine » (lhumaine.com), tout en publiant des vidéos délirantes, sur les réseaux, afin de promouvoir sa marque.

Pour moi, le plus important, c’est que le maillot puisse bien se vendre et qu’on puisse le porter en streetwear

Clément, qui a conçu le maillot fourth de Montpellier

« Je suis arrivé avec mon style, nous raconte-t-il. J’aime bien faire des designs originaux. Pour moi, le plus important dans le foot, c’est surtout que le maillot puisse bien se vendre et qu’on puisse le porter en streetwear. Certains maillots, c’est impossible de sortir avec. »

Si le MHSC avait posé des restrictions – notamment la couleur or –, l’influenceur-créateur a pu laisser parler son imagination pour façonner ce maillot fourth : « J’avais tout un storytelling, avec une vidéo dans laquelle j’avais bien expliqué ma démarche créative. J’ai repris l’architecture et la façade de l’Opéra de Montpellier, qui se trouve sur la place de la Comédie. J’ai retrouvé les plans des architectes des années 1800 et je me suis inspiré du dessin. » Problème : faire de beaux habits ne suffit pas toujours. « Montpellier fait la pire saison de son histoire, les supporters sont sur les nerfs. Le maillot a dû faire dix ventes », ironise Clément.

Avoir enfin l’attention de l’équipementier

Concours, fête annuelle, Octobre rose, date anniversaire, compétition inédite, capsule avec une marque de mode : toutes les occasions sont bonnes pour réapprovisionner les penderies de sa boutique officielle. « Un maillot aujourd’hui, c’est aussi un objet tendance, c’est du design, rappelle Henri Neveu. Il doit nous permettre de donner une tonalité moderne à notre histoire, notre patrimoine. Pour un maillot classique du début de saison, la liberté n’est pas la même. »

C’est le moyen pour les petits clubs d’avoir enfin l’attention de l’équipementier

Saintetixx, designer

Toujours plus de maillot ? « Si ça existe, c’est que ça marche », sourit le dircom lensois. « C’est bien pour mon business, se marre Clément Thiery. Cet autre designer, connu sous le nom de Saintetixx, se cache derrière les deux maillots nantais de l’exercice 2024-2025, mais aussi ceux des six dernières saisons du Clermont Foot… notamment un « fourth » conceptualisé lors de la saison 2020-2021.

« C’était pour l’anniversaire du club, on avait reproduit un maillot bleu d’il y a 30 ans (https://www.clermontfoot.com/30ans-clermontfoot63-maillotcollector-vercingetorix/). Chez les très gros clubs, ça va être très très fantaisiste, un truc un peu différent qui va marcher au niveau financier. Les petits font moins n’importe quoi. C’est vraiment plus un rappel historique. Mais ça permet quand même de sortir des templates, des maillots génériques. C’est le moyen pour les petits clubs d’avoir enfin l’attention de l’équipementier. D’habitude, on leur propose de faire des maillots dans le catalogue, pas hyper personnalisés. »

« Le marketing est au service de tous, même des plus petits clubs qui, à travers des initiatives, en faisant preuve de beaucoup de créativité sans forcément payer très cher, arrivent à se démarquer, analyse Nicolas Chanavat, co-auteur de l’ouvrage Marketing du Football, aujourd’hui professeur des Universités à l’Université Jean-Monnet-Saint-Étienne IUT/COACTIS. On a ce côté traditionnel, on a un ancrage, une identité qui permet de rassurer le fan. Et puis on a une volonté de toucher d’autres publics, d’autres cibles. Certains vont percevoir ça comme une forme de transgression, mais comme ce sont les troisième, quatrième maillots, ça peut passer. Ça n’impacte pas la perception générale de la marque. »

Clément, de L’Humaine, va dans le même sens : « Parfois, ça ne respecte pas les couleurs du club. Mais de l’autre côté, tu as plus de chance de trouver une pièce qui te plaît. » Plus de deux mois après la fin du concours, le trublion aux 37 000 abonnés sur Instagram attend toujours le maillot et les 200 euros de bons d’achat que le MHSC avait promis au vainqueur. Mais ça, c’est une autre histoire.

Jérémie Baron

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